Une personne affiliée à un régime de sécurité sociale dans un autre Etat membre de l'Union européenne où elle travaille ne peut se voir réclamer des prélèvements sociaux en France sur les revenus qu'elle tire de son patrimoine, même si les contributions sociales sont considérées en droit français comme des « impositions de toute nature » et non comme des cotisations de sécurité sociale.
- la contribution sociale généralisée (CSG), au taux de 8,2 % ;
- la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS), au taux de 0,5 % ;
- le prélèvement social, au taux de 4,5 % ;
- la contribution additionnelle au prélèvement social, au taux de 0,3 % ;
- le prélèvement de solidarité, au taux de 2 %.
Le niveau global d'imposition est donc de 15,5 %.
Dans un arrêt du 26 févr. 2015 (aff. C-623/13), la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a estimé que les personnes affiliées à un régime de sécurité sociale dans un des pays entrant dans le champ d'application territorial des règlements communautaires (en particulier le règlement (CEE) n°1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté), ne peuvent pas être assujetties en France à des prélèvements sociaux sur leurs revenus du patrimoine.
Le Conseil d'Etat s'est rallié à cette solution dans des arrêts du 27 juillet 2015 (req. n° 334551 et 342944) et du 17 avril 2015 (req. N° 365511).
Il s'agit des personnes affiliées à un régime de sécurité sociale dans un autre pays de l'UE, l'EEE ou la Suisse.
Pour ceux qui domiciliées en France, la solution de l'arrêt Ruyter s'applique aux prélèvements sociaux portant sur l'ensemble des revenus du capital imposables en France (produits de placement et revenus du patrimoine) et affectés au budget des organismes sociaux ;
Pour les personnes domiciliées hors de France, la mesure s'applique aux prélèvements sociaux appliqués aux revenus immobiliers (plus-values immobilières et revenus fonciers) tirés de biens situés en France et affectés au budget des organismes sociaux.
A la suite d’une question préjudicielle posée par le Conseil d’Etat (CE, 25 janv. 2017, n° 397881), la CJUE a admis que les revenus du patrimoine des ressortissants français qui travaillent dans un État autre qu’un État membre de l’UE/EEE ou la Suisse, et qui sont donc affiliées à un régime de sécurité sociale dans un État tiers, peuvent être soumis aux contributions sociales françaises (CJUE, 18 janv. 2018, aff. C-45/17, Jahin).
La Cour reconnaît que cette différence de traitement constitue une restriction à la libre circulation des capitaux entre un État membre et un État tiers, qui est, en principe, interdite par l’article 63 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).
Mais elle estime que cette restriction à la libre circulation des capitaux est justifiée par la différence de situation objective qui existe entre une personne physique, ressortissant d’un État membre, mais résidant dans un État tiers, autre qu’un État membre de l’EEE ou la Confédération suisse, et qui y est affiliée à un régime de sécurité sociale, et un ressortissant de l’Union résidant et affilié à un régime de sécurité sociale dans un autre État membre.
De plus, la Cour souligne qu’une interprétation différente reviendrait à faire bénéficier un ressortissant d’un État membre, résidant dans un État tiers, autre qu’un État membre de l’EEE ou la Confédération suisse, du principe de l’unicité de la législation applicable en matière de sécurité sociale, prévu à l’article 11 du règlement n° 883/2004 modifié relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté, alors même que, conformément à l’article 2, paragraphe 1, de ce règlement, celui-ci ne s’applique qu’aux ressortissants d’un des États membres qui sont soumis à la législation sociale d’un ou de plusieurs États membres.
En effet, le gouvernement a trouvé la parade contre la jurisprudence de la CJUE. Depuis le 1er janvier 2016 (article 24 de la loi n°2015-1702 du 21 décembre 2015), les prélèvements sociaux sur les revenus du capital sont budgétairement affectés à des organismes servant des prestations non contributives (fonds de solidarité vieillesse, caisse d'amortissement de la dette sociale, caisse nationale de solidarité pour l'autonomie) et non plus à ceux servant des prestations contributives (caisse nationale d'assurance maladie, caisse nationale d'allocations familiales, caisse nationale d'assurance vieillesse).
A la suite des arrêts "de Ruyter", l'administration a défini les modalités de remboursement des prélèvements sociaux en précisant que le prélèvement de solidarité de 2 % n'est pas restituable dans la mesure où il est affecté au financement du revenu de solidarité active (RSA) qui constitue une prestation non contributive (son versement n'est pas soumis à la justification d'une période d'activité professionnelle, d'affiliation ou de cotisation) et non pas une prestation de sécurité sociale relevant du règlement européen précité du 14 juin 1971.
Le Conseil d'État a confirmé la position de l'administration dans un arrêt du 19 Juillet 2016, req. n° 392784.
23/1/2018
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