Recours contre l'obligation de quitter le territoire français

Pierre Ladreit de Lacharriere - avocat

05/07/2020

 

L'obligation de quitter le territoire français est une mesure prise par l'autorité administrative, notamment le préfet, d'éloigner un étranger du territoire français. Elle intervient à la suite d'un refus de renouvellement de titre de séjour ou de séjour irrégulier en France.

 

L'obligation de quitter le territoire français (OQTF) peut faire l’objet d’un recours administratif ou contentieux.

 

Le recours contentieux contre l’OQTF fait l’objet d’un aménagement particulier qui permet d’offrir toute les garanties aux intéressés. Il s’ensuit qu’il n’est pas possible d’introduire un référé suspension ou un référé liberté contre l’OQTF.

 

Pour une présentation générale de l’OQTF, voir : l'obligation de quitter le territoire français

 

L'objet du recours

 

Le recours peut porter sur l'obligation de quitter le territoire français elle-même. 

 

Les mesures accompagnant l’OQTF peuvent également être contesté dans un même recours. Peuvent ainsi être attaquées : la décision de refus de séjour, la décision relatives au délai de départ volontaire, l'interdiction de retour en France, la décision fixant le pays de renvoi et, le cas échéant, la décision d'assignation à résidence.

 

Les différents recours

 

L’étranger peut adresser un recours administratif devant le préfet auteur de la décision (recours gracieux) ou devant le ministre de l'intérieur (recours hiérarchique).

 

Mais il est important de souligner que ce recours ne suspend pas les délais du recours contentieux (article R. 776-5, I, du code de justice administrative), contrairement à la règle habituelle en droit administratif. 

 

Si l'administrtion indique au requérant la possibilité de présenter un recours administratif lors de la notification de l'OQTF, elle doit mentionner l'absence de caractère suspensif de ce recours. A défaut, le délai du recours contentieux ne sear pas opposable à l'intéressé, sous réserve de l'application de la jurisprudence Czabaj (voir : recours devant le tribunal administratif, 4) A).

 

Compte tenu de la brièveté des délais de recours contentieux, l’exercice d’un recours administratif entraîne, en cas de rejet de ce recours, un risque sérieux de forclusion de la requête devant le tribunal administratif (tardiveté de la requête devant le juge). 

 

Le recours contentieux est la seconde option : la contestation est portée devant le tribunal administratif. 

 

Le recours contentieux est suspensif : l’OQTF n’est pas exécutée tant que le Tribunal n’a pas rendu sa décision sur la .

 

La présentation de la requête devant le tribunal administratif

 

a) S’agissant d’une mesure de police administrative, le tribunal administratif territorialement compétent est celui du lieu de résidence de l’étranger à la date de la décision (article R. 312-8 du code de justice administrative).

 

En cas de placement en rétention ou d’assignation à résidence, le recours doit être déposé auprès du tribunal administratif dont dépend le lieu de rétention ou d'assignation. L'étranger retenu par l'autorité administrative peut déposer son recours auprès de ladite autorité administrative S’il est en détention, il a la faculté de déposer sa requête auprès du chef de l'établissement pénitentiaire.

 

b) L’étranger peut attaquer, dans la même requête, tout ou partie des décisions notifiées simultanément (article R. 776-6 du CJA et article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile).

 

c) L’assistance d'un avocat n'est pas obligatoire, mais elle recommandée.

 

L’étranger peut naturellement bénéficier de l’aide juridictionnelle.

 

L'aide juridictionnelle peut être demandé par l'étranger “au plus tard lors de l'introduction de sa requête en annulation”(article L. 512-1 du CESEDA). Compte tenu des délais courts, cette demande peut être formulée dans la requête en annulation déposée au Tribuna et elle sera transmise au bureau d'aide juridictionnelle (BAJ) par le greffe.

 

Lorsqu'il est placé en rétention administrative ou assigné à résidence, l'étranger peut demander la désignation d'office d'un avocat directement au Tribunal lors de sa comparution, sans avoir à déposer de demande d'aide juridictionnelle auprès du BAJ. 

 

En cas de besoin, un interprète peut être désigné lorsque l'étranger est placé en rétention ou assigné à résidence.

 

Délais de recours contre l'obligation de quitter le territoire français

 

Le régime des délais de recours est devenu assez complexe. Mais, fort heureusement, le délai du recours contentieux doit être mentionné dans la décision notifiée à l’intéressé, sous peine que le délai de recours soit inopposable à l’intéressé (article R. 421-5 du CJA).

 

Pour les étrangers retenus ou détenus, l'administration doit également faire figurer, dans la notification de l’OQTF, la possibilité de déposer sa requête dans le délai de recours contentieux auprès de l'administration chargée de la rétention ou du chef de l'établissement pénitentiaire  (CE, 10 juin 2020, n° 431179 , M. A).

 

Le délai de recours contentieux varie selon le délai imparti à l’étranger pour quitter le territoire français. 

 

Quand l'obligation de quitter le territoire français est assorti d'un délai de départ volontaire, l'étranger dispose en général d’un délai de trente jours (30 jours) ou de quinze jours (15 jours) selon les cas pour déposer un recours devant le tribunal administratif.

 

Le même délai s’applicable aux recours en annulation des décisions accessoires qui accompagnent l'obligation de quitter le territoire français.

 

Lorsque l’obligation de quitter le territoire français n’est assortie d’un délai départ (OQTF sans délai), le recours doit être porté devant le juge administratif dans un délai de 48 heures à compter de la notification.

 

Lorsque l'autorité administrative compétente décide de supprimer le délai de départ volontaire alors même que celui-ci court encore (possibilité offerte par le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile), le délai de recours expire quarante-huit heures après la notification de la décision de supprimer le délai de départ volontaire.

 

Quelques précisions concernant le calcul des délais de recours :

 

- Les délai de 30 jours ou de 15 jours applicables aux OQTF assorties d'un délai de départ volontaire sont des délais francs.

 

- Le délai de 48 heures n'est pas un délai franc et les dispositions de l'article 642 du code de procédure civile ne s'appliquent pas (le délai qui expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé n’est pas prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant).

 

- Le point de départ du délai de recours est la date à laquelle l'étranger a reçu notification de l'obligation de quitter le territoire français par voie postale (courrier avec accusé de réception). Dans le délai commence à courir à compter de la date de la remise du pli à domicile, ou celle du retrait du pli recommandé à la poste ou à la date de la première présentation de l'avis de passage si le pli n'a pas été retiré à la poste dans un délai de quatorze jours. La notification peut être également être effectuée par voie administrative (au guichet de la préfecture ou au centre de rétention administrative). Dans ce cas le délai de recours court à compter de la signature de l'accusé de réception par l’intéressé.

 

- l’expiration du délai de recours contentieux ne fait pas obstacle à ce qu’un recours soit utilement déposé dans l’hypothèse où l’administration met à exécution une OQTF avec un retard d’au moins un an et que ce retard est imputable à cette dernière.

 

Les circonstances de droit et de fait ayant changé, le juge administratif considère que  l'exécution d’office n'est pas fondée sur l'arrêté initial mais sur une nouvelle décision d’OQTF. L’étranger pourra attaquer cette nouvelle OQTF dont l'existence est révélée par la mesure d’exécution elle-même, sans que puisse lui être opposé la tardiveté du recours contre la décision initiale (CE, 1er avr. 1998, n° 169280, Préfet des Yvelines c/ Nsonde). 

 

Cette jurisprudence a toutefois perdu une partie de son intérêt dans la mesure où l’administration ne peut pas prononcer un placement en rétention à l’encontre d’un étranger visé par une obligation de quitter le territoire datant de plus d’une année (art. L. 561-2 , 5° du CESEDA).

 

- indiquons enfin que le juge des libertés et de la détention (JLD) peut être saisi à l'expiration d'un délai de 5 jours après la décision de placement en rétention administrative (OQTF sans délai). Le JLD statue dans un délai 24 heures. Il peut décider d'assigner l’étranger à résidence si celui-ci présente des garanties de représentation suffisantes, prévoir une assignation à résidence avec surveillance électronique ou décider de prolonger la rétention pour une période de 20 jours renouvelable.

 

Les suites du recours devant le tribunal administratif

 

Le juge administratif dispose d'un délai de trois mois pour statuer sur les obligations de quitter le territoire français en l'absence d'assignation à résidence ou de placement en rétention (article L. 512-1 du Code de justice administrative). Le tribunal statue en formation collégiale.

 

En cas de placement en rétention ou d’assignation à résidence, le délai de jugement est de 72 heures et le dossier est confié à un juge statuant seul (avec possibilité de renvoi devant une formation collégiale). Le jugement est alors rendu « sur le siège », le jour même de l’audience, et son dispositif est immédiatement notifié au requérant.

 

L'étranger dispose d'un mois pour faire recours en appel devant la cour administrative d'appel. L’appel ne suspend pas la décision du tribunal et l'obligation de quitter le territoire peut être exécutée par les autorités administratives. Le pourvoi en cassation est possible contre la décision de la cour administrative d'appel.

 

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