Décisions administratives et règle du « silence vaut acceptation » : vers une simplification ?

La nouvelle règle selon laquelle le silence gardé pendant deux mois par l'autorité administrative sur une demande vaut décision d'acceptation est une mesure de simplification qui fait couler beaucoup d'encre.

 

Jusqu'en 2014 la règle était que le silence gardé par l'administration pendant plus de deux mois sur une demande de l'administré valait rejet.

 

Cette règle qui remonte au milieu du 19 ème siècle (décret du 2 novembre 1864 à l’égard des recours gracieux auprès des ministres) a été renversée par la loi du 12 novembre 2013 (L. n° 2013-1005, habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l'administration et les citoyens : Journal Officiel du 13 Novembre 2013). Le nouvel article 21 de la loi du 12 avril 2000 est désormais ainsi rédigé : « le silence gardé pendant deux mois par l'autorité administrative sur une demande vaut décision d'acceptation ».

 

La règle nouvelle est entrée en vigueur au 12 novembre 2014 pour les actes relevant des services de l'État. Elle entrera en vigueur le 12 novembre 2015 pour les services les collectivités territoriales et pour ceux des organismes de sécurité sociale et des autres organismes chargés de la gestion d'un service public administratif.

 

1) Une règle nouvelle ?

 

Il existait déjà environ 400 exceptions à la règle selon laquelle le silence gardé par l'administration valait rejet de la demande.

 

C'était notamment le cas en matière d'aménagement : autorisation tacite d'acceptation pour les permis de construire, permis d'aménager ou permis de démolir (articles R. 424-1 du code de l'urbanisme) sous réserve des exceptions énumérées aux articles R. 424-2 et R. 424-3, les autorisations de défrichement (article R. 341-4 du code forestier)...

 

Aujourd'hui, le principe selon lequel le « silence vaut acceptation » est applicable à 1200 procédures administratives. Le délai est de deux mois pour 730 procédures. Il est supérieur à deux mois pour 470 procédures (cf. Rapport d'information fait au nom de la commission des lois du sénat sur la loi du 12 novembre 2013 : rapport n° 629 (2014-2015) du 15 juillet 2015).

 

Mais les exceptions au principe sont plus nombreuses que les cas d’application : le silence continue de valoir rejet pour 2 400 autres procédures regroupées dans 42 décrets d’application de la loi du 12 novembre 2013 (JO n°0254 du 1 novembre 2014).

 

Les exceptions augmenteront encore avec l'entrée en vigueur de la loi pour les collectivités locales.

 

Compte tenu du nombre de ces exceptions, ne serait-il pas plus juste de dire que, sauf exception, le silence gardé par l'administration vaut rejet ?

 

2) Une simplification toute relative

 

Le nouvel article 21 de la loi du 12 avril 2000, qui comporte des affirmations et des doubles négations, n'est pas d'une lecture très aisée. Il prévoit que le nouveau principe applicable et, par dérogation, le silence gardé par l'administration pendant deux mois vaut décision de rejet :

 

1° Lorsque la demande ne tend pas à l'adoption d'une décision présentant le caractère d'une décision individuelle ;

 

2° Lorsque la demande ne s'inscrit pas dans une procédure prévue par un texte législatif ou réglementaire ou présente le caractère d'une réclamation ou d'un recours administratif ;

 

3° Si la demande présente un caractère financier sauf, en matière de sécurité sociale, dans les cas prévus par décret ;

 

4° Dans les cas, précisés par décret en Conseil d'Etat, où une acceptation implicite ne serait pas compatible avec le respect des engagements internationaux et européens de la France, la protection de la sécurité nationale, la protection des libertés et des principes à valeur constitutionnelle et la sauvegarde de l'ordre public;

 

5° Dans les relations entre les autorités administratives et leurs agents.

 

Afin de faciliter le travail d'identification des décision, le gouvernement publie sur un site internet relevant du Premier ministre une liste de 113 pages régulièrement mise à jour des procédures pour lesquelles le silence gardé sur une demande vaut décision d'acceptation. Cette liste mentionne l'autorité à laquelle doit être adressée la demande, ainsi que le délai au terme duquel l'acceptation est acquise (sur Légifrance : http://legifrance.gouv.fr/Droit-français/Silence-vaut-accord-SVA).

 

Les administrés devront en effet prendre soin d'adresser leur demande à l’administration compétente puisque pour que le délai commence à courir.

 

Il est vrai que la loi du 12 novembre 2013 ne remet pas en cause la règle selon laquelle l'autorité administrative Incompétemment saisie d'une demande doit la transmettre la demande à l'autorité administrative compétente et en aviser l'intéressé (article 20 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000). Mais, dans cette hypothèse, le délai commence à courir à la date à laquelle l'autorité compétente a été saisie. En cas d'inertie de l'autorité saisie à tort, il appartiendra au demandeur de découvrir lui-même l'autorité compétente pour statuer sur sa demande.

 

Pour s'assurer que la demande rentre bien dans le champ d'application de la règle, il lui faudra consulter les 42 décrets pour déterminer si elle n'entre pas plutôt dans les exceptions au principe. Pour éviter ce travail laborieux, le Sénat suggère au gouvernement de dresser une liste des exceptions (Rapport d'information précité).

 

On voit que la simplification administrative est une opération complexe tant pour le gouvernement que pour les citoyens...

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