Obligation de quitter le territoire français et droit d'être entendu

 

Le code de l'entrée, du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) n'oblige pas l’administration à recueillir les observations de l’intéressé avant de lui notifier une obligation de quitter le territoire français (OQTF) à la suite d'un refus de délivrance ou de renouvellement d'un titre de séjour (3° de l’article L. 511-1 du CESEDA).

 

Il a déjà été jugé que l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 (relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l’administration) ne saurait être utilement invoqué à l’encontre d’une décision portant OQTF. Cette solution,dégagée précédemment pour les reconduites à la frontière, a été appliquée aux OQTF au motif que les dispositions de l’article L. 511-1 du CESEDA déterminent l’ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse applicables aux étrangers (CE, avis, 19 octobre 2007, HAMMOU et M. BENABDELHAK, n°s 306821 et 306822).

 

Cette solution méconnaît-elle le droit, prévu au 2 de l’article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, de toute personne d’être entendue avant toute mesure individuelle défavorable ?

 

Les dispositions de la Charte s'adressent aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union (article 51). Mais l'article L. 511-1 du CESEDA est issu de la loi du 16 juin 2011 qui a procédé à la transposition de la directive dite « retour »  du 16 décembre 2008 et relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. Les dispositions de la Charte sont donc applicables aux OQTF.

 

Pour répondre à la question, le Conseil d'Etat se place dans la sillage de l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE)  le 10 septembre 2013, dans l'affaire C-383/13. Dans cet arrêt, la Cour se prononce sur les conséquences de la violation du droit d'être entendu dans le cadre de la prolongation d'une mesure de rétention administrative. La CJUE précise que « lorsque la prolongation d'une mesure de rétention a été décidée dans le cadre d'une procédure administrative en méconnaissance du droit d'être entendu, le juge national chargé de l'appréciation de la légalité de cette décision ne saurait accorder la levée de la mesure de rétention que s'il considère, eu égard à l'ensemble des circonstances de fait et de droit de chaque cas d'espèce, que cette violation a effectivement privé celui qui l'invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent ».

 

Appliquant cette grille de lecture, d'ailleurs assez proche de la jurisprudence Danthony (CE 23 décembre 2011, n° 335033), le CE juge que lorsqu'une OQTF est prise en même temps que le refus de délivrance d'un titre de séjour (3° de l’article L. 511-1 du CESEDA), le droit d'être entendu est satisfait si l'intéressé a pu présenter ses observations avant que n'intervienne la décision de refus de titre de séjour. Lorsqu'il se présente en préfecture pour demander un titre de séjour, l'étranger fait valoir tous les éléments en faveur de sa situation. Le droit d'être entendu est donc respecté à cette occasion. Informé des mesures d'éloignement qui pourront être prises, l'étranger ne peut réclamer une nouvelle fois à l'administration de lui permettre de réitérer ses observations, de façon spécifique, sur l'OQTF.

 

CE 4 juin 2014, n°370515

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