La procédure de rectification contradictoire

05/10/2019

Pierre ladreit de Lacharrière - avocat

 

La procédure de rectification (redressement) contradictoire concerne les contribuables qui se sont conformés à leurs obligations déclaratives et comptables.

 

Cette procédure se distingue nettement des procédures d'évaluation d'office ou de taxation d'office mises en oeuvre à l'encontre des contribuables qui ne respectent pas leurs obligations déclaratives.

 

En effet, dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire, le contribuable dispose de garanties plus fortes et l'administration supporte la charge de la preuve du bien-fondé des rehaussements.

 

Précisons que la procédure de rectification contradictoire n'est pas applicable : 

- aux impositions directes perçues au profit des collectivités locales ou d'organismes divers, sauf en ce qui concerne la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises ; 

- aux contributions indirectes ; 

- aux droits de timbre lorsqu'ils ne sont pas payés sur état ou sur déclaration.

 

 

Champ d'application de la procédure de rectification contradictoire

 

La procédure de rectification contradictoire est applicable lorsque le service des impôts « constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques dus en vertu du Code général des impôts », ainsi que dans les cas où il « effectue la reconstitution du montant déclaré du bénéfice industriel ou commercial, du bénéfice non commercial, du bénéfice agricole ou du chiffre d'affaires déterminé selon un mode réel d'imposition » (article L. 55 du livre des procédures fiscales).

 

La procédure de rectification contradictoire s’applique à tous les impôts (y compris les différentes taxes d’urbanisme : taxe d'aménagement, versement pour sous-densité, taxe locale d'équipement... ), mais pas aux impôts directs locaux et aux contributions indirectes et de droits de timbre (lorsqu'ils ne sont pas payés sur état ou sur déclaration).

 

Elle n'est donc pas applicable à la contribution économique territoriale (toutefois, dans un arrêt Simoens du 5 juin 2002, le Conseil d'Etat a posé que le principe général des droits de la défense oblige l’administration à permettre au contribuable de formuler ses observations avant d'établir un rehaussement de la taxe professionnelle, devenue la CET).

 

Pour les contributions indirectes (établies par la Direction générale des douanes et droits indirects), l'article L. 80 M du livre des procédures fiscales prévoit que le contribuable est informé des motifs et du montant de la taxation encourue et qu'il est invité à faire connaître ses observations oralement ou par écrit.

 

La proposition de rectification

 

C'est une étape essentielle du contrôle fiscal lorsque la procédure contradictoire est suivie par l'administration des impôts.

 

Compte tenu de son importance, la règlementation fiscale et la jurisprudence ont précisé les exigences qui s'imposent à l'administration.

 

Pour plus de précisions, voir : la proposition de rectification

 

Les observations du contribuable

 

La proposition de rectification indique au contribuable qu'il peut présenter de observations dans un délai de 30 jours. Ce délai peut être prolongé d'un nouveau délai de trente jours.

 

Le contribuable peut accepter expressément ou tacitement les rectifications.

 

L'acceptation met fin à la procédure contradictoire de rectification. Les impositions correspondant aux chefs de rectification qui ne donnent pas lieu à observations peuvent être mise en recouvrement par l'administration. 

 

Si le contribuable qui a accepté les rectifications se ravise, il pourra former une réclamation contentieuse, mais il ne pourra pas demander la saisine de la commission départementale ou nationale des impôts et saisir le supérieur hiérarchique du vérificateur et l'interlocuteur départemental. Le contribuable qui a accepté les rehaussements supporte en outre la charge de la preuve de l’exagération des impositions qui en résultent.

 

Si le contribuable formule des observations dans le délai imparti, l’administration a l'obligation d'y répondre. La réponse aux observations du contribuable doit être motivée.

 

Délai de réponse de l'administration aux obervations du contribuable : sauf en cas de graves irrégularités privant la comptabilité de valeur probante (et sauf pour les personnes morales et les sociétés en participation à l'actif desquelles sont inscrits des titres de placement ou de participation pour un montant total égal ou supérieur à 7 600 000 euros), l'administration répond aux observations dans un délai de soixante jours lorsque le redressement notifié fait suite à la vérification de comptabilité lorsque le contribuable exerce une activité industrielle ou commerciale de vente de produits ou de fourniture de logement dont le chiffre d'affaires est inférieur à 1 526 000 euros ou une autre activité industrielle, commerciale ou non commerciale dont les recettes annuelles sont inférieures à 460 000 euros.

 

Hormis ces hypothèses qui concernent les petites entreprises, l'administration n'est pas tenue par un délai pour répondre aux observations du contribuable.

 

Les voies de recours

 

  • Les recours prévus par la Charte des droits et obligations du contribuable vérifié :

 

Cette charte est remise au contribuable faisant l'objet d'une vérification de comptabilité ou d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle (ESFP). Ses dispositions sont opposables à l'administration sur le fondement de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales.

 

La charte prévoit la possibilité de prévoit la possibilité de faire appel à un supérieur du vérificateur, au conciliateur fiscal départemental et à l'interlocuteur départemental.

 

  • La  commission départementale ou nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires (CDI)

 

Le contribuable dispose d'un délai de trente jours à compter de la réception de la réponse de l'administration à ses observations pour présenter une demande de saisine de la commission départementale des impôts directs (ou de la commission nationale pour les entreprises qui exercent une activité industrielle ou commerciale et dont le chiffre d'affaires hors taxes excède 50 000 000 € s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir le logement, ou 25 000 000 € s'il s'agit d'autres entreprises).

 

La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient lorsque le désaccord porte sur :

 

- le montant du résultat industriel et commercial, non commercial, agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition;

 

- les conditions d'application des régimes d'exonération ou d'allégements fiscaux en faveur des entreprises nouvelles, à l'exception du crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche ;

 

- les frais généraux des entreprises, les rémunérations non déductibles pour la détermination du résultat des entreprise, les dépenses que ces entreprises doivent mentionner sur le relevé prévu à l'article 54 quater du code général des impôts ;

 

- la valeur vénale des immeubles, des fonds de commerce, des parts d'intérêts, des actions ou des parts de sociétés immobilières servant de base à la taxe sur la valeur ajoutée.

 

L’avis de la commission ne lie pas l’administration, même si en pratique cet avis est souvent suivi par le service.

 

  • La commission départementale de conciliation :

 

Elle est compétente lorsque le désaccord porte sur les prix ou les évaluations servant de bases aux droits d'enregistrement, à la taxe de publicité foncière ou à l'impôt sur la fortune.

 

Comme la commission départementale des impôts, la commission départementale de conciliation peut être saisie à l'initiative de l'administration ou du contribuable.

 

  • Le comité de l'abus de droit fiscal lorsque la rectification est fondée sur l'article L. 64 du livre des procédures fiscales.

  • Le comité consultatif du crédit d'impôt pour dépenses de recherche lorsque le désaccord porte sur la réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt défini à l'article 244 quater B du code général des impôts ("Crédit d'impôt recherche").

 

Les suites de la procédure de rectification contradictoire

 

À l'issue de ces différentes étapes, les impositions sont mises en recouvrement.

 

Le contribuable en est averti par un "avis d'imposition" ou un "avis de mise en recouvrement".

 

Le contribuable peut payer l'impôt dans le délai imparti, en demandant éventuellement des délais de paiement, ou contester les impositions en adressant une réclamation à l'administration, assortie le cas échéant d'une demande sursis de paiement.

 

En cas de rejet de sa réclamation, le contribuable peut contester les impositions et les pénalités en formant un recours devant le tribunal administratif ou le tribunal de grande instance pour les matières relevant de sa compétence (droits d'enregistrement, impôt sur la fortune immobilière).

 

Le recours devant le tribunal a pour effet de prolonger le sursis de paiement (dans l'hypothèse naturellement où ce sursis a été demandé) jusqu'à la notification du jugement.

 

Le jugement du tribunal pourra lui-même faire l'objet d'un recours en appel devant la Cour administrative d'appel ou la Cour d'appel selon les cas, sauf pour certains jugement qui sont rendu en "premier et dernier ressort" et pour lesquels le recours en cassation est seul possible (litiges relatifs aux impôts locaux et à la contribution à l'audiovisuel public, à l'exception des litiges relatifs à la contribution économique territoriale ; demandes d'annulation des décisions prises sur des demandes de remise gracieuse matière fiscale)

 

Il doit être précisé que les effets du sursis de paiement prennent fin à la date de notification du jugement de première instance : le recours en appel ne dispense pas le contribuable de payer l'impôt.

 

LLA Ladreit de Lacharriere avocats

 

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